lundi 25 août 2008

Bras de fer entre producteurs de lait et Entremont Alliance


Présent depuis plus de 50 ans sur son marché, Entremont Alliance, est l'un des acteurs majeurs de l'industrie fromagère internationale.

Entremont Alliance est né de l'alliance de 2 histoires fromagères: Entremont, entreprise laitière haut-savoyarde, créée en 1948 et Unicopa, coopérative bretonne fondée en 1960, via sa branche d'activité de produits laitiers avec les sociétés Beuralia, Cofranlait et Eurosérum.
Entremont Alliance est détenu à 63.5% par la CNP d'Albert Frère et à 36.5% par Unicopa.

Il collecte chaque année 2,2 milliards de litres de lait auprès de 9.000 producteurs, il fabrique et commercialise 195.000 tonnes de fromages (emmental, comté, raclette, beaufort, fromages fondus), 65.000 tonnes de poudre laitières, 250.000 tonnes de poudre de lactosérum et de produits laitiers formulés, le tout pour un C.A. global de 1,6 millions d'euros.
Pendant plus de 10 ans, les prix du lait ont fait l'objet de négociations globales au niveau national.

En France, la fixation du prix du lait n'est pas du seul ressort des entreprises laitières. Deux autres échelons interviennent: les Interprofessions régionales et depuis 1997, l'Interprofession nationale.

Ce dispositif a permis d'atténuer les évolutions annuelles du prix du lait liées à la conjoncture des produits laitiers, ceci tant à la hausse qu'à la baisse.

Ces négociations aboutissaient à une "recommandation" trimestrielle de l'Interprofession sur l'évolution des prix et toutes les entreprises la suivaient.
Entre 1997 et 2001, le prix du lait à 3.7% de taux butyreux (TB), départ ferme, n'a progressé que de 7% en France, de 2001 et 2004 il a reculé de 7% et en 2004, il est revenu à son niveau de 1997.
Depuis 2004, les nouvelles modalités de fixation du prix du lait payés aux producteurs sont calculées selon les modalités définies par les accords de l'Interprofession laitière réunissant les industriels du secteur, les coopératives et les producteurs.

Elles se basent sur les décisions prises fin 2003 dans le cadre de la politique agricole européenne: baisse des prix d'intervention sur le beurre et sur la poudre de lait écrémé.
Le calcul inclut le prix de base fixé pour le lait à 38 grs de matières grasses, les plus-values ou moins-values pour la matière grasse et la matière protéique, les bonifications ou réfactions liées à la qualité, les primes et compléments de prix éventuels, les prélévements à charge des producteurs (taxes fiscales et parafiscales, retenues diverses).
Mais depuis cet été, ce système a volé en éclats. Au nom de la libre concurrence, la DGCCRF a demandé à l'Interprofession de ne plus donner de recommandations.
Depuis juillet, Entremont Alliance, Lactalis, Bongrain, Bel, Danone et les autres sont donc libres de négocier chacun les prix qu'ils veulent.
Les producteurs ont tenté de sauver malgrès tout, l'existence d'un prix unique, en substituant à la "recommandation" de l'Interprofession une "revendication" syndicale.
Pour le lait collecté cet été, ils ont réclamé une hausse de 49 euros pour 1.000 litres, soit environ 17%.

Tous les industriels ont semble-t-til accepté, tous, sauf un, Entremont Alliance qui lui propose 30 euros pour 1.000 litres (portant ainsi le prix à environ 310 euros).

Les cours du beurre, du lactosérum et de la poudre de lait, qui avaient flambé en 2007, sous l'effet d'une relative pénurie, sont revenus à leur niveau antérieur: le beurre est ainsi retombé de 28% en un an et le lactosérum de 64%, plaide Entremont Alliance.

"Il faut un prix du lait réaliste, qui tienne compte du marché, et non une hausse très forte qui arriverait à contretemps" souligne Alain Troalen.
Mais les producteurs ne l'entendent pas de cette oreille, ils subissent de plein fouet la hausse de leurs coûts de production et craignent que le coup de force d'Entremont ne fasse boule de neige auprès des autres industriels des yaourts ou du fromages.

(source les Echos du 18/08/08 par Denis COSNARD).

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